"Back to Black", nouveau biopic controversé sur la comète Amy Winehouse
Avant même sa sortie en France le 24 avril puis aux Etats-Unis et au Canada le 17 mai, le film a été critiqué pour ses partis pris sur la vie de la défunte chanteuse et pour avoir surfé sur la réputation sulfureuse de l'artiste, qui a profondément souffert de l'attention publique et du harcèlement des tabloïds. "Compte tenu de l'attitude de vautour avec laquelle on s'est acharné sur sa vie, il est presque impossible de trouver une raison sincère de faire un film sur Winehouse, ou du moins une raison qui ne soit pas motivée par l'appât du gain", a fustigé le journaliste musical Roisin O'Connor dans The Independent.
Amy Winehouse, qui a été retrouvée morte d'une surdose d'alcool en 2011 à l'âge de 27 ans, a marqué le monde de la musique par sa voix soul éraillée, ses textes intimes et puissants, et son style unique inspiré des pin-up des années 1950, avec chignon choucroute, large trait d'eye-liner noir et multiples tatouages.
En 2006, son deuxième album "Back to Black", récompensé d'un Grammy aux Etats-Unis, l'a fait connaître dans le monde entier, porté par son tube "Rehab", dans lequel la londonienne racontait sa bataille contre les addictions. Le biopic de la réalisatrice britannique Sam Taylor-Johnson ("Cinquante nuances de Grey") est le second film consacré à la chanteuse après le documentaire oscarisé d'Asif Kapadia, "Amy", en 2015, qui avait été décrié par la famille Winehouse.
Ce film, deuxième documentaire le plus rentable de l'histoire du box-office britannique, s'attardait trop sur les aspects négatifs de la vie de la star, avait dénoncé son père, qui fustigeait aussi sa représentation comme un homme "avide" et en "quête d'attention". Il a assisté lundi soir à la première du film à Londres avec son ex-femme, Janis, mais la réalisatrice Sam Taylor-Johnson a assuré que la famille de la chanteuse n'y avait pas contribué. "C'était important de les rencontrer par respect", a-t-elle expliqué au site Empire, "mais ils ne pouvaient pas changer les choses, ou me dicter ce que je devais tourner".
Quête de "vérité"
La cinéaste a souligné avoir recherché "la vérité" sur la vie d'Amy Winehouse: "Amy aimait son père, quoi qu'il ait fait de bien ou de mal". L'acteur Eddie Marsan, qui incarne Mitch Winehouse, a expliqué qu'il avait essayé d'éviter de tomber dans la posture "confortable" consistant à "blâmer quelqu'un" pour la mort de la chanteuse, que ce soit son père ou son ex-mari Blake Fielder-Civil.
"Back to Black" dépeint également leur relation sentimentale houleuse, son ancien compagnon ayant été accusé de l'avoir initiée à l'héroïne. Blake Fielder-Civil a confié en 2018 qu'il porterait toujours le "fardeau de la culpabilité" pour avoir joué un rôle dans les addictions d'Amy Winehouse.
Marisa Abela, qui incarne la chanteuse, a souligné que le but du film n'était pas de "juger" les personnages de l'histoire et leurs décisions: "Si les spectateurs estiment qu'Amy n'aurait pas dû aimer ou faire confiance à telle ou telle personne, c'est leur droit (...) mais les seuls méchants de notre histoire sont les addictions et les paparazzis. On ne dit pas aux gens ce qu'ils doivent penser".
Malgré des critiques mitigées, ce film s'annonce comme un succès vu l'aura qui entoure encore la chanteuse, presque quinze ans après sa mort, et l'attrait pour les biopics musicaux, souvent rentables quelle que soit leur qualité.
Ed Potton, du journal The Times, trouve le film "un peu léger", et s'il salue les efforts fournis par Marisa Abela pour chanter comme Amy Winehouse, il juge qu'elle n'est pas à la hauteur de sa voix inimitable. Pour Peter Hoskin du Daily Mail, le film n'arrive pas à illustrer le "génie rebelle" de la chanteuse. "Mieux vaut écouter +Back to Black+, l'album ou la chanson, et se rappeler ainsi de ce qui a fait d'Amy une star".