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Face à Trump, la stratégie britannique des ronds de jambe
Photo by Chris Lawton / Unsplash

Face à Trump, la stratégie britannique des ronds de jambe

Entre sa rhétorique flatteuse, sa mansuétude devant les menaces commerciales américaines et son choix de rejeter, aux côtés des Etats-Unis, la déclaration de Paris sur l'intelligence artificielle, Londres prend ces derniers temps le contre-pied des Européens pour mieux amadouer Donald Trump.

AFP
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"Le Royaume-Uni n'a pas d'allié plus proche que l'Amérique", a tranché l'ambassadeur britannique aux Etats-Unis, Peter Mandelson, dans une vidéo débordante de superlatifs diffusée lundi sur X, le réseau social d'Elon Musk.

Cette figure du parti travailliste, ancien commissaire européen, a aussi appelé sur la BBC à "respecter et comprendre ce qui motive (Donald Trump), quel est son mandat et comment ses alliés doivent parfois s'adapter".

Des amabilités à rapprocher des propos tenus fin janvier par le chef de la diplomatie britannique, David Lammy, qui avait loué la "grâce incroyable" de l'Américain, jugé "très drôle, très, très, très amical, très chaleureux" lors d'un dîner. Le même qu'il avait qualifié dans le passé de "sociopathe aux sympathies néo-nazies".

Elogieux et pacifiques, les Britanniques espèrent ainsi rester "hors de la ligne de mire de Trump sur les droits de douane et toute autre forme de politique étrangère américaine agressive", estime Michael Plouffe, professeur d'économie politique à l'université UCL de Londres.

"Pas de réaction impulsive"

"Le Royaume-Uni, comme d'habitude, essaie d'avoir le beurre et l'argent du beurre" en évitant "les pires excès de Trump" tout "en poursuivant son rapprochement avec l'UE", renchérit Jonathan Portes, économiste au King's
College de Londres.
L'Union européenne reste d'un côté le premier partenaire commercial du Royaume-Uni. Mais de l'autre, Londres espère échapper à la guerre commerciale et continue même de rêver depuis le Brexit d'un grand accord de libre-échange avec les Etats-Unis, que le Premier ministre Keir Starmer a récemment appelé
de ses voeux.

Et face au péril Trump, ses intimidations commerciales quasi-quotidiennes, ses déclarations diplomatiques déroutantes, le Britannique a ces derniers jours fait pencher la balance vers Washington.

Pas question, ainsi, de se joindre aux "contre-mesures fermes" promises mardi par l'UE en riposte aux droits de douane de 25% sur l'acier et l'aluminium de Donald Trump à partir du 12 mars: flegmatique, le Royaume-Uni préfère "travailler" sur ces taxes avec les Etats-Unis. "Ce dont l'industrie britannique a besoin (...) ce n'est pas d'une réaction impulsive, mais d'un sens froid et lucide de l'intérêt national du

Royaume-Uni, fondé sur une évaluation complète de toutes les implications des actions des États-Unis", a sèchement expliqué Douglas Alexander, le secrétaire d'Etat britannique chargé du Commerce.

"Le forcer à choisir"

Londres a également choisi la voie américaine en matière d'intelligence artificielle, en refusant mardi, comme les Etats-Unis, de signer la déclaration finale du sommet sur l'IA. "Nous n'adhérons qu'à des initiatives qui sont dans l'intérêt national", a justifié un porte-parole du Premier ministre.

Cette approche "prudente" sur l'IA vis-à-vis de Washington "est assez étroitement alignée avec l'agenda intérieur de Starmer", qui a promis en janvier de faire de son pays un "leader mondial" de de cette technologie en laissant les entreprises tester leurs innovations avant toute régulation, relève Michael Plouffe.

Dans ces conditions, "éviter l'antagonisme avec l'État qui abrite trois des principaux fournisseurs d'IA semble logique", ajoute-t-il. "Cela pourrait bien susciter des faveurs auprès de Trump", au moment où les géants américains du numérique, devenus proches alliés du dirigeant, entendent faire plier l'UE en
matière de régulation.

La stratégie britannique peut-elle fonctionner ? "Cela dépend du niveau de confrontation de Trump avec l'UE et s'il essaye de pousser le Royaume-Uni à se détourner de l'UE en le forçant à choisir", répond Jonathan Portes. Mais "personne, y compris lui, ne sait ce qu'il va faire".

Le président américain affirme pour l'instant qu'il "aime beaucoup" Keir Starmer, jugeant "qu'il a fait du très bon travail jusqu'à présent".

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