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GPA en Angleterre et reconnaissance en France
Photo by Luma Pimentel / Unsplash

GPA en Angleterre et reconnaissance en France

La GPA, légale en Angleterre mais interdite en France, soulève des questions juridiques pour les couples binationaux. Depuis octobre 2024, la Cour de cassation facilite la reconnaissance des jugements anglais. Décryptage.

Francoise Bonnaillie-Valmorin
Membres Public

Après les articles sur les pensions alimentaires pour les enfants, les formalités de transcription, le nom de famille, l’exequatur des jugements anglais d’adoption et les contrats maritaux voici ce qu’il faut savoir sur la gestation pour autrui (GPA) et les développements récents de la jurisprudence française.

Petit rappel important : la gestation pour autrui est légalisée et encadrée en Angleterre. Elle est illégale en France. La gestation pour autrui pratiquée sur le territoire français est punie de 6 mois d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende pour les parents d’intention (article 227-12 du Code Pénal) et d’un 1 an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende pour l’entremise entre une personne souhaitant un enfant et une femme acceptant de la porter et de le remettre (article 227-12 al 2 du Code Pénal).

 

Quelles sont les conditions légales de la gestation pour autrui  « surrogacy » en Angleterre ? Elles sont prescrites par la  section 54 de la loi  Human Fertilisation and Embryology Act 2008. L’enfant doit avoir un lien génétique avec l’un de ses deux parents d’intention. La mère porteuse doit donner son consentement à l’abandon de ses droits parentaux au profit des parents d’intention. Les parents d’intention doivent être un couple (mariés ou pacsés ou concubins) hétérosexuel ou homosexuel. L’application doit être déposée devant le tribunal dans un délai de 6 mois suivant la naissance de l’enfant. Au moment de l’audience devant le juge, l’enfant doit déjà vivre avec les demandeurs et les officiers CAFCASS (Children And Family Court Advisory  and Support Service) établissent un rapport sur le bien-être de l’enfant. L’un des deux parents doit avoir son « domicile » en Angleterre. Le « domicile » est une notion autonome de droit anglais qui s’apparente à la nationalité. Les dépenses remboursées à la mère porteuse doivent être considérées comme raisonnables. Une somme de £15,000 en Angleterre est jugée raisonnable.

 

Il est donc possible pour un couple binational de recourir à une convention de mère porteuse en Angleterre. A l’issue du processus les parents d’intention obtiennent un « parental order ». Ils sont les seuls parents de l’enfant, ils sont les parents légaux et un second acte de naissance est enregistré dans le registre des « parental orders ».

 

Très souvent le parent français souhaite que son enfant ait un passeport français. Il faudra donc faire reconnaitre le jugement en France par la voie de l’exequatur, pour que ce jugement produise des effets légaux en France.

 

La jurisprudence française a beaucoup évolué en la matière. Il n’existe pas de convention binationale entre l’Angleterre et la France. Le juge français va vérifier les 3 conditions de l’exéquatur  qui sont issues de la jurisprudence:

1.      Le juge anglais doit être compétent pour le litige. Ce sera le cas car l’enfant sera né en Angleterre. Sa résidence habituelle sera en Angleterre.

2.      Le jugement anglais doit être conforme à l’ordre public international de fond et de procédure. C’est cette condition qui pose le plus de difficultés.

3.      Le jugement ne doit pas être obtenu par fraude. Ce ne sera pas le cas. Le jugement anglais de « parental order » est un jugement définitif et l’acte de naissance de l’enfant mentionnant ses deux parents d’intention comme étant ses parents légaux sera mentionné dans le registre d’état civil anglais.

 

Pendant longtemps le juge français indiquait que la décision anglaise était contraire à l’ordre public international français et refusait de faire produire des effets en France à un jugement anglais de « surrogacy ». Ensuite la jurisprudence a évolué. La filiation était reconnue en France pour le parent d’intention qui avait un lien génétique avec l’enfant mais le deuxième parent d’intention devait demander au juge français de faire produire en France les effets d’une adoption plénière envers son enfant.

 

La position de la Cour de Cassation est maintenant claire et la procédure d’exequatur est plus facile depuis les arrêts importants du 2 octobre 2024 et du 14 novembre 2024 (Cass, civ1ère 2 octobre 2024 n°22-20.883, Cass, Civ 1ère 2 octobre 2024 n°23-50.001 et Cass, Civ 1ère 14 novembre 2024 n°23-50.016). Il est désormais interdit au juge français de réviser le jugement anglais de GPA. Cette filiation doit être reconnue en tant que telle en France et produire les effets qui lui sont attachés. Le parent d’intention qui n’a pas de lien génétique avec l’enfant n’a plus besoin de demander au juge français de faire comme s’il avait adopté son enfant.

 

Par contre il faut bien faire attention à satisfaire le juge français quant à son contrôle de l’ordre public international qui est la deuxième condition citée plus haut. Le juge fançais va devoir s’assurer qu’il n’y a pas de risques en ce qui concerne la vulnérabilité  des personnes à la convention et le droit de l’enfant et de l’ensemble des personnes au respect à la vie privée. Les jugements anglais de « parental order » ne sont pas motivés. Il faudra donc fournir un certificat de coutume d’un solicitor anglais expliquant la procédure. Il est crucial pour le juge français de vérifier le consentement de la mère porteuse et des parties à la convention. Il faudra mentionner et détailler l’identité des parties. Pour que le jugement anglais soit reconnu et produise ses effets en France, il faudra penser à expliquer au juge les circonstances et les conditions de la gestation pour autrui pratiquée en Angleterre en donnant le plus de détails possible.

 

Françoise Bonnaillie-Valmorin

https://www.fbvfamilylaw.co.uk/fr

fbv@fbvfamilylaw.co.uk

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