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London Sumo Story : un corps à corps hors du temps, entre le Ciel et l’Enfer
Grand Sumo Tournament - Royal Albert Hall 2025

London Sumo Story : un corps à corps hors du temps, entre le Ciel et l’Enfer

A l'occasion du tournoi de sumo organisé au Royal Albert Hall, Francais a Londres a interviewé ces athlètes XXL aux pieds du ring. Reportage au coeur d'un monde impénétrable.

Francine Joyce
Membres Public

Londres, le 15 octobre 2025 : une date exceptionnelle dans l’agenda sportif Mondial. Elle marque l’ouverture du “Grand Sumo Tournament” de Londres. C’est la 2ème fois en plus de 3 siècles que ce championnat sacré se déroule en dehors du Japon.

Quarante deux lutteurs d’élite “habillés” d’un mawashii  - ceinture de soie d’environ 10 mètres de long et de 4 kg enroulée autour de l’abdomen et entre les cuisses (mais sans aucune vertu érotique !) sont venus pour 5 jours de combats dans la capitale britannique. Un événement exceptionnel organisé par le géant Sanrio Société mère de Hello Kitty et son PDG - CEO Tomokuni Tsuji venu accompagné l'équipe au Royaume Uni .

Tomokuni Tsuji - CEO de Sanrio à Japan House - 15/10/2025 ; photo F. Joyce

Affichant un IMC au-delà des limites physiques (une moyenne de 180 kg pour 1.78m) les lutteurs s’affrontent depuis mercredi dans une série de matchs explosifs aux rituels aussi mystiques que fascinants.

Le prestige presque divin de ces champions à la corpulence exhibée et revendiquée, remonte aux traditions ancestrales du Japon. Tout comme les samouraïs, ils portent le chignon traditionnel. Ils ne pourront se couper les cheveux qu’au terme de leur carrière professionnelle. Le graal de tout sumotori : devenir un yokozuna, la plus élevée des six divisions de la classification. La majorité d’entre eux arriveront à l’âge de la retraite (entre 30 et 35 ans) avant d’avoir atteint ce niveau. Depuis la création de l’association officielle japonaise en 1925, soixante quinze athlètes seulement ont obtenu ce titre. Ils sont 42 aujourd’hui et ils sont tous présents au tournoi de Londres. Pour conserver leur place au sommet du classement Mondial extrêmement pénalisant, ils doivent se présenter à tous les combats, même blessés. 

Yokosuma Hoshoryu, 26 ans, né en Mongolie nous raconte : " Nous avons profité du tournoi de Londres pour faire connaitre notre culture aux anglais en visitant la ville en tongues à pieds et à vélo ! Nous ne pouvons pas sortir en public sans porter un "yukata" -nos tenues traditionnelles japonaises que vous appelez "kimonos" par erreur ; et comme il fait froid à Londres, nous avons du enfiler des collants ! Tout comme Hello Kitty qui est notre ambassadrice ici ! C'est elle la star des selfies... Je crois que les anglais ont un peu peur de nous, ils nous observent de loin !

Les rikishis, (“hommes forts” en japonais) regroupent environ 700 membres dans le monde – le terme sumotori est réservé aux débutants. Nous travaillons endurance, souplesse et puissance depuis nos 15 ans. Nous devons tous adopter un nom de combat et nous entraîner dans le silence d’internats configurés sur le modèle des monastères. Nous partageons les doctrines d’enfermement et d’obéissance absolue à la hiérarchie. Mais aujourd’hui les tournois ne sont plus accompagnés de prières."

Japan House Pictograms Photo F. Joyce

A leur arrivée sur le ring, ces lutteurs qui rappellent les gladiateurs de la Rome antique, tapent dans leurs mains pour attirer l’attention des dieux. Puis, ils tapent du pied et jettent des poignées de sel sur le sol pour éloigner les mauvais esprits. Ces gestes rituels peuvent parfois durer plus longtemps que les combats eux-mêmes qui dépassent rarement 6 secondes. Le coup d’envoi est donné par l’éventail de l’arbitre. Les deux géants se jettent l’un sur l’autre. Le vainqueur est celui qui expulse son adversaire hors du ring ou lui fait toucher le sol par une autre partie du corps que la plante des pieds dans un délai de 4 minutes maximum.

Hoshoryu Tomokatsu, numéro 1 mondial explique : "Si le poids du corps permet de stabiliser notre centre de gravité et d’augmenter notre puissance, il facilite aussi la perte de vitesse et d’équilibre et donc aussi la chute ou la sortie du cercle. "

Contrairement à la boxe, la lutte ou le judo, il n’existe pas de catégories de poids dans la pratique sumo. Certains lutteurs pèsent parfois 60 kilos de plus ou de moins que leur adversaire.  Repas hyper-caloriques (10 000 à 20 000 calories par jour) et siestes prolongées rythment la vie ascétique de ces montagnes de muscles … et de graisse.

Tamawashi raconte : "Nous nous levons à l'aube, à 4h du matin pour un entrainement intensif de 3 heures, 300 squats, 82 prises, des étirements intenses pour travailler nos tendons et ligaments et des litres de sueur. Ce programme douloureux est suivi d'un bain relaxant et d'une visite chez le «tokoyama» (le coiffeur), puis un déjeuner sans modération à base de "chanko" , beaucoup de riz, du poulet, de la viande, du poisson, des noodles. Se resservir montre notre motivation. Et de la bière, beaucoup de bière ! Grossir est notre obsession à tous. Nous n'avons pas besoin de diététicienne pour cela ! Nous continuons de manger même si nous n'avons plus faim.

Nous travaillons force, flexibilité et agilité pour pouvoir pousser et soulever nos très lourds adversaires. Nous sommes tous capables de faire le grand écart ! Même à la verticale ! Tout se passe dans les jambes pour un bon maintien au sol et dans la puissance de concentration. "

Grand Sumo Tournament - Royal Albert Hall 2025 - photos F. Joyce

Logiquement mais malheureusement, à l’arrêt de leur carrière sportive, l’espérance de vie de ces athlètes, ces héros qui parlent avec les dieux, dépasse rarement 65 ans. Aprés la gloire, ils souffrent de toutes les co-morbidités du surpoids : essoufflement, diabète, apnée du sommeil, maladies cardiovasculaires et métaboliques.

Ce week-end, destination le dohyô, l’aire dépaysante du combat  et des traditions millénaires japonaises.

Japan House Photo F. Joyce

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