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Eléonore Lette : "Il faut juste se lancer, être sympa et généreux de son temps"

Eléonore Lette : "Il faut juste se lancer, être sympa et généreux de son temps"

Avocate généraliste franco-canadienne installée à Londres depuis treize ans, Eléonore Lette jongle entre droit international et engagement caritatif. Portrait d'une femme qui a fait de la protection de l'enfance sa cause, à travers son initiative originale : le Lélé's French Movie Club.

Jérémie Raude-Leroy
Membres Public

Depuis le cinéma d'où les films du Lélé's French Movie Club sont projetés, Eléonore Lette évoque avec passion son parcours atypique qui l'a menée de Paris à Londres, en passant par Montréal et Genève. Cette avocate troisième génération d'une famille de juristes, a su transformer ses origines binationales en atout professionnel.

Un parcours international programmé dès l'enfance

"J'avais un peu été préprogrammée pour faire mes études au Canada", confie celle qui a grandi à Paris de père canadien de Montréal et mère niçoise. Les casquettes et t-shirts de l'université McGill ornaient déjà sa chambre d'enfant. Cette prédestination s'est révélée être une chance : "J'ai passé les meilleures années de ma vie étudiante là-bas. J'y ai rencontré mon mari et mes meilleurs amis qui vivent un peu partout dans le monde."

Après des études de sciences politiques et d'histoire à McGill, puis un diplôme de la faculté de droit de Montréal et de Paris, Eléonore découvre le monde humanitaire à Genève. Deux années marquantes entre l'ONU - "grande désillusion" - et l'ONG Défense pour les Enfants International qu'elle "a adorée". Cette expérience forge sa vision du monde professionnel. Elle choisit de se former dans un grand cabinet canadien, une véritable « usine à avocats » comme bien d’autres où les « billable hours » l’emportent sur les relations humaines, tant avec les clients qu’avec les associés. Démoralisée car aimant réellement le droit, son père dit : 'Viens travailler avec nous, la fiscalité ne sera peut-être pas ta vocation, mais la clientèle privée est fascinante et cela te permettra de gagner ta vie correctement tout en soutenant les causes qui te tiennent à cœur'. Avec le recul, vingt ans plus tard, il avait entièrement raison.

Londres, ville d'adoption et d'opportunités

En 2012, elle rejoint son mari à Londres qui travaille dans la finance. "Après beaucoup d'années d'aller-retour, j'ai connu les débuts de l'Eurostar qui arrivait à Waterloo", se souvient-elle. Grâce aux nouvelles technologies, elle parvient à maintenir ses activités avec le cabinet familial parisien et genevois tout en développant sa propre structure.

Il y a deux ans, elle franchit une nouvelle étape en fondant la branche londonienne du groupe familial avec sa collaboratrice Camille Bloch. "Je ne suis pas solicitor en droit anglais, mais j’exerce pleinement à Londres en tant qu’avocate franco-canadienne. Cette double formation juridique me permet d’accompagner des clients internationaux et d’intervenir dans des dossiers transfrontaliers. Elle revendique une pratique généraliste assumée : « Je me vois vraiment comme un médecin de famille, une avocate de confiance pour de nombreuses familles." Fiscalité internationale et immobilière sont au cœur de son activité, mais elle revendique sa polyvalence : "Chaque jour, je traite de sujets variés. Achats d'œuvres d'art, immobilier, succession, conflits familiaux... Je privilégie avant tout la relation humaine, elle forge la confiance que nos clients nous accordent."

Le Lélé's French Movie Club : cinéma et engagement

L'engagement caritatif d'Eléonore s'inscrit dans une tradition familiale. "Mes grands-parents ont beaucoup souffert pendant la guerre et l’engagement caritatif est quelque chose qui leur était cher et qui s'est transmis." Sa grand-mère, première professeure de criminologie à l'université de Montréal, lui transmet une vision particulière de la justice : comprendre les causes plutôt que punir uniquement.

Cette philosophie la conduit vers la Lucy Faithful Foundation, seule association britannique travaillant sur la prévention des abus sexuels sur les enfants en s'adressant aux potentiels auteurs. "C'est un sujet tellement tabou que personne n'ose en parler. Ils ont mis en place cette helpline anonyme qui s'appelle Stop It Now, pour permettre à ceux qui en ont besoin de demander de l'aide avant qu'un abus ne soit commis" explique-t-elle. "C'est, selon moi, de la vraie prévention, à la fois courageuse et indispensable".

Pour soutenir cette cause sensible, elle imagine pendant le Covid une initiative originale : allier sa passion du cinéma français à la collecte de fonds. "Au lieu de leur signer un chèque, je vais louer une salle de cinéma et leur reverser intégralement les dons collectés." Né en 2023, le Lélé's French Movie Club propose des projections de films francophones avec reversement des bénéfices à la fondation. "Tout le monde est ravi, on passe un bon moment dans une salle confortable, on découvre un film français et on soutient une bonne cause !"

Vision d'avenir : créer une "French House" londonienne

Eléonore nourrit un projet ambitieux pour la communauté française de Londres. S'inspirant du concept des ‘members clubs’ anglais : "J'aimerais fonder une French house dynamique où il y aurait un restaurant français, un cinéma, et d'autres événements culturels dans un même immeuble, un peu à la Soho House." Je ne cherche pas à concurrencer l’Institut français qui organise des évènements remarquables à Londres, mais plutôt créer un hub culturel privé propice aux rencontres aussi bien professionnelles que personnelles. » Avis aux potentiels investisseurs : ce hub culturel n’attend plus que vous !

Son regard sur l'intégration à Londres reste positif : "Je ne me suis jamais sentie jugée par les Anglais. Je suis ravie de vivre en Angleterre." Cette expérience nourrit ses conseils aux futurs expatriés français : "Il faut laisser tous les préjugés et la négativité typiquement française derrière eux quand ils s'installent ici."

La simplicité comme philosophie

"Il faut être ouvert d'esprit, il faut être sympa, il ne faut pas tout prendre au sérieux", résume Eléonore. Cette philosophie guide autant ses relations professionnelles que son engagement associatif. "On se met tellement de freins. Il faut juste se lancer, ça marche ou ça ne marche pas." Pour elle, la personnalité prime sur les diplômes : "Sur les CV, je regarde les centres d'intérêts, les sports, les hobbies. La personnalité, ça compte énormément et ça en dit souvent bien plus que les lignes du parcours pro."

Mère de trois enfants, Eléonore Lette incarne une génération d'expatriés français qui ont su s'adapter sans renier leurs origines. Entre expertise juridique et engagement humanitaire, elle prouve qu'il est possible de concilier réussite professionnelle et valeurs personnelles, tout en gardant cette simplicité qu'elle prône : "Être sympa et généreux de son temps."


Pour suivre le Lélé's French Movie Club : @frenchmovieclublondon sur Instagram

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