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La crise des soldes
Soldes 2024 à Londres - photo F Joyce

La crise des soldes

Quand l'attrait des prix barrés s'obscurcit et ouvre la voie à de nouveaux modes de consommation

Francine Joyce
Membres Public

Cinq, quatre, trois, deux, un zéro ! Le compte à rebours est terminé ! les soldes 2024 qui ont débuté le 20 juin ont légalement fini le 26 juillet . Ces 6 semaines de remises exceptionnelles et de prix cassés (autrefois tant attendues) semblent cette année avoir perdu de leur attractivité. Selon les statistiques nationales, le chiffre d'affaire des commerçants au Royaume Uni affichait une baisse de 1.2% au mois de juin par rapport à 2023. En France, le bilan total des ventes à la mi-juillet a chuté de 5.8% par rapport à l'an dernier. Les rayons des grandes enseignes sont restés clairsemés. Aux caisses, les maigres files d'attentes n'ont pas donné lieu aux soupirs d'impatience et aux trépignements "traditionnels". Avec la multiplication de "villages de marques" type Bicester à l'écart des grandes villes, des promotions toute l’année sur internet et des ventes "flash" de fins de collections ("mid-season sales"), les soldes ont perdu leur caractère événementiel. Elles ne sont plus un temps fort et n’ont pas sucité le délire collectif habituel du solstice d’été. Dans les magasins, (le premier jour tout comme le dernier et les 42 entre les deux), la fièvre acheteuse n’était pas au rendez-vous.

Cette année, beaucoup de stocks d'invendus et pas de mouvements de foule. 59% des français (6 sur 10) ont tourné le dos aux soldes estivvales 2024. par manque de moyens et par manque d'intérêt. La fréquentation des commerces ( habillement, chaussures, électro-ménager, sport ...) a révélé une nouvelle génération de consommateurs atoniques, frileux et rationnels avec un budget fixe ( aux alentours de 307 euros en moyenne cette année en France -donc 15% de moins qu'en 2023) et une idée précise de ce qu'ils veulent acheter.

La météo maussade de juin ET juillet est en grande partie responsable de ce manque d’enthousiasme général. Nos decisions d’achats sont bien souvent gouvernées par nos humeurs et nos émotions. Or, le climat économique incertain et les budgets en repli ont détourné les habitués loin des boutiques et d'achats plaisir au rabais. Difficile, sinon impossible de “trouver son bonheur” dans un contexte financier en crise … même à moins 90%.

En période de tumulte politique “anxiogène”, il n’est plus question de succomber aux achats compulsifs. Chacun s’inquiète de possible hausses d’impôts, de perspectives professionnelles freinées , d'une potentielle baisse de leur pouvoir d'achat...

 Ces dernières semaines, malgré la cacophonie de slogans de plus en plus inventifs et de plus en plus alléchants, nous nous sommes plus focalisés sur les élections que sur la mode ou sur notre confort.

photo F.Joyce

Et pourtant, en Europe, nous (addicts du shopping) avons été mis(es) à "l’entrainement des soldes" dés le berceau ! Depuis des décennies nous avons alimenté avec une effervescence irrationnelle l’euphorie nationale pour les braderies et les liquidations saisonnières. Ainsi, nous avons su pendant des années, relever "sportivement" tous les défis des soldes et faire face à tous les obstacles pour fouiller et dénicher les bonnes affaires : la lutte féroce pour les tailles, les queues interminables, les pastilles de couleurs sur les étiquettes, le désordre festif des bacs, les odeurs de transpiration, les coups de coudes et les pieds écrasés, le regard impénétrable et suspicieux des agents de sécurité … Mais aujourd’hui, la fête est finie. Même les accros les plus fanatiques aux bonnes affaires  se tournent vers les plateformes de seconde main "on-line" type Vinted, Preloved, Le bon coin , Dpop ... Selon l'étude de Toluna Harris, ils représenteraient en France 44.3% des e-acheteurs en 2023 . A cela, s'ajoutent les magasins de déstockage et les “outlets” où les produits paraissent les mêmes qu’en magasins.

En réalité ce ne sont que des artefacts griffés certes, mais de moins bonne qualité, fabriqués exclusivement pour ces centres commerciaux type Marques Avenue, avec des matières premières moins résistantes – comme en témoignent régulièrement les enquêtes et conclusions de la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrrence et Répression des Fraudes). Et la concurrence des ventes en-ligne de fins de séries - tous produits confondus- type BrandAlley (mode femme, enfants, hommes, linge de maison, maroquinerie, literie, jardinage, jouets...) ou marques specifiques (sauf l'hyper luxe comme Hermès qui propose des ventes privées exclusives) explose. 2% des français uniquement déclarent n'avoir jamais rien acheté sur internet. La croissance du e-commerce dans l'hexagone ne cesse d'augmenter : 2.35 milliards de transactions en 2022 et 42 millions de cyber acheteurs en 2023 - essentiellement des jeunes de moins de 29 ans. Mais pour la période des soldes, là aussi les chiffres reculent de 1.8%. La tendance est donc générale et s'oriente vers une consommation durable.

 Cette année donc, la frénésie joyeuse a laissé sa place à la sagesse ;

Cette année le “coup de balai” s’est porté sur les dérives du matérialisme et de notre société de consommation ;

Cette année signe peut-être le retour aux valeurs fondamentales, à une économie responsable et à l’humanisme.

Cette année, le bonheur est dans le prés !

 

Loin de la Société de consommation ! Vive la nature ! Photo F. Joyce

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