L’arnaque derrière les résiliations de contrat

Cauchemar, enfer, calvaire, horreur… Quand les français racontent leurs difficultés à se désengager d'un contrat ou d'une simple inscription sur Internet, ils s’égosillent comme l’Orchestre du Splendid dans la “ Salsa du Démon ”!

Plateformes de streaming, cours de yoga, boutiques en ligne, applications de musique, salons de beauté, info-lettres du nouveau supermarché du quartier qui ouvre ses portes dans 3 semaines… quinze jours… 1 semaine… après demain… demain dés midi dans la joie et avec des coupons de réductions exceptionnels comme pour une amie de toujours ... Comment ces sociétés ont-elles obtenu votre email pour vous écrire avec autant d’insistance, de récurrence et de passion ?

Chaque Français cumule en moyenne 12 abonnements contractuels - plus ou moins utiles et pas toujours gratuits.

Deux Français sur trois avouent qu'ils ne savent même plus combien ils dépensent tous les mois pour ces contrats-là. Parfois même, ils ne savent plus à quels abonnements ils ont souscrit. Souvent l'accès à ce service en ligne était gratuit… enfin au début. Et très souvent aussi, vous n'aviez rien demandé… Vous avez juste reçu un gentil mail (généré par une IA) accompagné d’un abonnement sans frais de quelques semaines à une appli sympa (cours de gym, life-coaching, recettes diététiques...). Vous avez ensuite effectivement bénéficié gratuitement de l’actualité hebdomadaire du club des “London Green Fingers”. Vous avez même reçu des sachets de graines à planter gratuitement sur votre balcon. Puis est arrivée la première facture - car après 4 semaines vous êtes systématiquement engagé(e) pour l’année (au tarif préférentiel de 312£ au lieu de 350£). Si, si ! C’était écrit dans le premier courier en italiques “ Sans demande d’arrêt des communications de votre part dans un délai de 28 jours, votre adhésion sera considérée comme confirmée et effective”. Et puis "vous avez accepté les sachets de graines et vous allez vraiment vous régaler avec les radis qui vont bientôt pousser chez vous, grâce à nous ! Où est le problème ? "

Et c’est là que l’Enfer commence. Car il y a la loi, la théorie ... et il y a la réalité pratique. Deux termes qui sont loin d'être synonymes.

Après avoir appuyé 18 fois sur le bouton “Delete” qui ne fonctionne pas, on se noie dans les méandres de systèmes sans règles, de l’administration légale, des services techniques …

Quand vous essayez de résilier, l’opérateur (si il répond) ne l’entend pas de la même oreille que vous. Après multiples “chats” et mails, vous trouvez (à la 26è page en micro caractères) un numéro d’appel à l'étranger (probablement dans un autre hémisphère) car ces sociétés malhonnêtes sont souvent basées bien loin de votre domicile :

“ Service clients, bonjoooouuuur ! Je suis Bernard. Quel est votre numéro de cliente ? Vous souhaitez résilier ? Ah, vous n’êtes pas au bon service. Je vous transfère et vous souhaite une excellente journée. Votre temps d’attente est estimé à environ 17 minutes (…)  

Pour revenir à l’accueil, tapez étoile. Veuillez patienter et préparer vos identifiants. Votre satisfaction nous tient à coeur. Tous nos agents sont actuellement en ligne. Merci de votre compréhension. Veuillez noter votre numéro de dossier *7934-aRnaQ-2000!*. Vous pouvez consulter nos offres spéciales sur notre site. Vous êtes peut-être éligible pour un “upgrade”. Vous êtes actuellement 12è sur la liste d’attente. Nous vous rappelons que cet appel sera enregistré et que le service termine à 12h. Il reprendra à 14h. Merci de rappeler ou de nous écrire sur notre chat-room @QAFQA.com pour une réponse rapide et personnalisée à vos questions. “

L’opérateur était pourtant si aimable lors de l’inscription… tout à coup il est impossible à joindre.

Et oui, les offres alléchantes (type un téléphone pour 1 euro, un bilan nutritionnel offert, 50% sur notre boutique pendant 4 semaines...), présentées comme des bons plans, se révèlent souvent dangereuses pour votre portefeuille et votre vie privée.

En 2020 déjà Benoît Delépine et Gustave Kervern mettaient en scène dans le film “ Effacer l’historique “, trois Français face à des procédures à rallonge pour tenter de résilier un abonnement en ligne - sans succès.

En acceptant les fastidieuses conditions générales de ventes (les “terms and conditions” que vous ne lisez pas vraiment) et en acceptant les graines de radis, vous signez la fameuse clause de reconduction tacite et le tarif de l’abonnement. Derrière le manque de clarté et de lisibilité de ces offres et forfaits se cache souvent un prestataire aux dents longues qui s'enrichit avec vos données personnelles. Elles sont pour lui un trésor qu’il ne veut pas voir disparaître de ses fichiers. Pour lui, vos habitudes d'utilisation du Web, sont une mine d'or qu’il peut revendre plusieurs fois à différentes enseignes de vente, des publicitaires, des départements marketing. Votre profil virtuel de consommateur / d’abonné permet de cibler vos préférences… et ainsi de vous vendre les produits les plus susceptibles de vous intéresser.

Certes, des centaines de sites offrent des conditions de dés-inscription assez simples. Parmi eux, Twitter, My Space, AirBnb, Dropbox, Ebay, Google, Hotmail, Instagram…

Pour Facebook, partir est facile mais vos dialogues en groupes (chats) ou sur votre messagerie privée restent accessibles par ceux avec qui vous avez communiqué. Une disparition totale du réseau n’est techniquement pas possible.

Pour d’autres, la dés-inscription ne peut se faire qu’en contactant Bernard et ses collègues au service consommateurs du site concerné. Parmi eux Adobe, Amazon, iTunes/Apple ID, Asos, Etsy, Groupon, Skype, Ticketmaster...

 Enfin, la liste noire, où il est impossible de faire disparaître totalement votre compte rassemble des dizaines de sites dont Youtube - Pinterest - Wikipedia - Starbucks - Wordpress.com - DHL - Go Daddy - Netflix …Votre profil peut être «suspendu» ou «désactivé», mais il restera toujours disponible si vous souhaitez le réactiver «au cas où».

Pour la plateforme de vidéos Youtube, vous ne pouvez pas éradiquer votre compte sans supprimer aussi votre compte Google . Mais vous pouvez fermer votre chaîne.

Suite à une plainte de plusieurs associations de consommateurs et à un dialogue avec la Commission Européenne, le géant américain Amazon a récemment simplifié la procédure de dés-inscription à son offre « Prime ». Donc oui, c’est faisable. En Allemagne, la loi exige un maximum de 3 clicks. La France a promis de prendre les mêmes mesures.

Mais même si vous parvenez à mettre fin à vos forfaits, vos données “confidentielles” seront conservées pendant plusieurs années à compter de la dés-inscription ou du dernier contact. Vos e-mails, mots de passe, photos, identité laissent irrémédiablement des traces numériques sur le Net. A chaque site utilisé sur le web, à chaque formulaire d'inscription rempli, vous laissez inéluctablement votre empreinte numérique.

Dés que vous cliquez sur “unsubscribe”, des sites spécialisés saisissent immédiatement les coordonnées de votre résiliation pour vous orienter vers un ou plusieurs autres opérateurs... Ainsi, une fois "des-abonné(e) " vous devenez la proie de nouveaux "harceleurs"...

Légalement, si le gérant d'un site, dissimule sciemment des informations essentielles, cela peut être considéré comme une pratique commerciale déloyale. Il encourt alors des sanctions sévères et des amendes administratives importantes.

Rappelons qu'en France la CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés) est compétente pour récolter les plaintes d'internautes qui ne parviennent pas à supprimer leurs données personnelles d'un site.