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"L'orchestre de femmes d'Auschwitz" : la puissance de la musique, la force des femmes
Le dernier livre de Anne Sebba

"L'orchestre de femmes d'Auschwitz" : la puissance de la musique, la force des femmes

Rencontre exceptionnelle avec Anne Sebba à quelques jours de la parution de son livre "The Women's Orchestra in Auschwitz" - un sujet d'une actualité effrayante.

Francine Joyce
Membres Public

Ce 26 mars, à la Royal Overseas League de Londres, la journaliste-écrivain Anne Sebba présentait à la presse internationale son dernier livre : " L'orchestre de femmes d'Auschwitz ". Un ouvrage documentaire qui, à l’instar de tous ses livres, donne la parole à des femmes – des femmes au destin exceptionnel, des femmes pourtant effacées de l’Histoire. Dans ce texte, elle souhaite rendre un hommage particulier à celles qui ont vécu l’horreur des camps nazis et à l’héritage qu’elles laissent aux femmes et aux hommes d’aujourd’hui.

Anne Sebba le 26 mars 2025 - photo F. Joyce

 À l’occasion du 80e anniversaire de la libération du camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, Le 27 janvier 2025, les derniers témoins de l’holocauste ont à nouveau raconté la violence de leur enfance volée et torturée - pour faire parler les zones muettes de l’Histoire, pour rendre compte de leurs combats silencieux dans l’enfer du camps et surtout pour préserver leur mémoire vivante. Plus d’un million de personnes ont été assassinées ou n’ont pas survécu aux conditions inhumaines d’Auschwitz. Parmi elles, des milliers de jeunes filles, des mères, des femmes dont l’historienne Anne Sebba dresse un portrait bouleversant.

Des heures de recherches dans les archives et les photos de la Shoah, d’interviews de rescapé(e)s, d’échanges avec leurs familles et de messages destinés aux générations futures. En ce début d’année 2025 où les conflits se multiplient et menacent la paix mondiale, Anne Sebba nous rappelle combien le joug des nazis n’est pas si lointain et si different des dérives extrêmistes contemporaines

L’angle qu’elle a choisi peut paraitre insolite : l’orchestre de femmes d’Auschwitz. On peut légitimement se demander quel pouvait bien être le rôle de la musique dans cet enfer de violences physiques et psychologiques, de maladies, de faim constante, de terreur et de mort. Un contexte incompatible avec la musique. Et pourtant…

Les camps étaient entourés de haut-parleurs et une quinzaine d’ensembles musicaux ont été recensés dés 1933 - fanfares, quatuors vocaux, orchestres symphoniques de plus de 80 membres. L’un d’eux composé uniquement de femmes était dirigé par la nièce du célèbre Gustav Mahler, Alma Rosé. Leur rôle ? Distraire les SS mais aussi accompagner au son de marches militaires ou de joyeuses polkas, les prisonniers en marche vers leur lieu de travaux forcés, étouffer aussi avec des opéras, les cris lors des exécutions, encourager les enfants vers les chambres à gaz avec des berceuses Yiddish… Cet horizon sonore était une musique “de contrainte”, une arme supplémentaire pour humilier et inculquer la discipline … Sous peine d’être battus, les détenus étaient obligés de chanter même pendant les punitions, souvent des chants anti-sémites… Toutefois, pour impressionner de hauts dignitaires de l’armée allemande, certains répertoires étaient formellement interdits. Les déportés étaient considérés comme trop “impurs” pour jouer Mozart ou Wagner.

Mais la musique a aussi été un moyen de résistance à l’insoutenable, un passeport de survie. Les détenues musiciennes bénéficiaient de conditions de vie légèrement améliorées. Elles étaient exemptées de travaux forcés et étaient autorisées à répéter à l’intérieur. La nuit, elles étaient 2 et non 8 par paillasse et leurs rations de pain étaient un peu plus généreuses que pour les autres prisonnières.

photo extraite du livres de Anne Sebba " The Women Orchestra of Auschwitz"

Ainsi, quand la jeune violoncelliste de 20 ans Anita Lasker-Wallfisch explique à Joseph Mengele (surnommé “l’ange de la mort”), nue, cheveux rasé et tatoué du matricule : 69388, qu’elle est musicienne, le commandant lui sauve la vie.

Ces femmes doivent leur vie à leur capacité à jouer d’un instrument ; elles n’avaient pas plus de valeur aux yeux des SS que les autres déportées.

À la fin de la guerre, 38 des instrumentistes de cet orchestre féminin sur les 40 ont survécu.

Dans son dernier livre, Anne Sebba leur donne un second souffle de vie pour que leur courage, leur force discrète et tenace nous inspirent toutes aujourd’hui et demain.

Anne Sebba - photo F. Joyce

 

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