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Quel avenir pour l’entreprise Thames Water?
L'entreprise Thames Water, responsable de la gestion des eaux de Londres, suscite des inquiétudes. Des discussions sont en cours pour mettre en place un régime d'administration spéciale ou nationalisation afin d'assurer une stabilité et améliorer les investissements.
Contexte
L'entreprise de gestion des eaux de la région de Londres, Thames Water, suscite des inquiétudes au sein du gouvernement britannique. Le mercredi 28 juin, après la démission soudaine de la PDG du groupe Sarah Bentley, les autorités se sont déclarées prêtes à envisager toutes les options pour faire face à cette situation préoccupante et les responsables gouvernementaux ont admis, dans une déclaration à l'AFP, qu'ils étaient en train de se préparer à différents scénarios, « comme le ferait tout gouvernement responsable ».
La ministre des entreprises a exprimé son inquiétude face à cette situation en déclarant : « Je suis très préoccupée. Il est évident qu'il s'agit d'une situation commercialement délicate et je sais que mes collègues du gouvernement étudient les mesures que nous pouvons prendre. » Le gouvernement britannique cherche à trouver des solutions pour assurer la stabilité de l'entreprise et garantir la continuité de ses services essentiels à la région de Londres.
L'exécutif a tenu à rassurer le public sur la résilience financière du secteur de l'eau, malgré les récentes critiques portant sur les rejets d'égouts dans les mers et rivières. Dans une déclaration à Sky News, Kemi Badenoch a affirmé que « le secteur dans son ensemble est financièrement résilient » et que l'approvisionnement en eau « est protégé ». Cependant, le gouvernement et l'organisme de régulation du secteur, Ofwat, ont révélé qu'ils étaient engagés dans des discussions préliminaires concernant la possibilité de placer Thames Water dans un régime d'administration spéciale, similaire à celui utilisé pour sauver le fournisseur d'énergie Bulb de la faillite à la fin de l'année 2021, selon les informations recueillies par Sky News.
Dans une déclaration à l'AFP, l'Ofwat a précisé que des discussions étaient en cours avec Thames Water afin d'établir un plan solide et crédible visant à redresser l'activité et à transformer ses performances pour le bénéfice des clients et de l'environnement. Ces discussions surviennent au lendemain de la démission soudaine de la directrice générale de Thames Water, Sarah Bentley. Cette démission intervient dans un contexte de critiques généralisées à l'encontre du secteur de l'eau, accusé de rejets d'égouts dans les cours d'eau et les océans, en raison notamment d'un manque d'investissements dans le réseau d'égouts datant de l'époque victorienne.
L'entreprise de gestion des eaux de la région de Londres Thames Water, criblée de dettes, a annoncé lundi 10 juillet que "ses actionnaires ont accepté d'apporter 750 millions de livres" (878 millions d'euros) de nouveau financement d'ici 2025.
Pourquoi l’entreprise est en difficulté ?
Un article du Guardian, publié le 30 juin 2023, met en lumière différents problèmes auxquels fait face Thames Water. La dette actuelle de Thames Water représente environ 80 % de la valeur totale de l'entreprise, ce qui en fait la compagnie d'eau la plus endettée en Angleterre et au Pays de Galles. De plus, les infrastructures vieillissantes de Thames Water, datant de l'époque victorienne, ont entraîné des déversements d'égouts dans les rivières et les océans. Ces rejets ont suscité de vives critiques de la part du public et des organisations de protection de l’environnement. La gestion de l'eau en Angleterre a été critiquée notamment après la fermeture de nombreuses plages l'été dernier en raison de la qualité de l'eau de mer jugée impropre à la baignade et dangereuse pour la santé. De plus, on observe un certain gaspillage d'argent dans des initiatives qui se sont révélées être des échecs ou des "projets éléphants blancs", aggravant les difficultés financières de l'entreprise. Ces projets, tels que la construction de réservoirs d'eau supplémentaires, n'ont pas réussi à résoudre les problèmes de fourniture d'eau ou d'assainissement.
Il y a un besoin de réformes, notamment en termes d'investissements et de réglementation avec une meilleure planification et d'une surveillance plus stricte. Selon le journal The Times, l'amélioration des infrastructures nécessitera des investissements coûteux, se chiffrant en milliards de livres sterling. Le journal a averti que les factures d'eau pourraient augmenter de 40% d'ici 2030 afin de financer les travaux nécessaires.
En réponse aux diverses préoccupations, la ministre de l'Environnement, Therese Coffey, a promulgué en avril un plan d'investissement de 1,6 milliard de livres et a accordé des pouvoirs renforcés aux régulateurs. L'Ofwat, le régulateur du secteur, a également récemment annoncé que les compagnies d'eau britanniques pourraient se voir interdire de verser des dividendes si elles ne respectent pas les normes environnementales. Par ailleurs, l'Ofwat a confirmé mardi l'approbation de 33 projets d'amélioration des infrastructures d'une valeur totale de 2,2 milliards de livres (2,6 milliards d'euros).
Thames Water: une entreprise privée
Détenue par un consortium d'actionnaires comprenant le fonds de pension canadien Ontario Municipal Employees Retirement System et le britannique Universities Superannuation Scheme, l'entreprise affichait une dette d'environ 14 milliards de livres à la fin de septembre 2022, selon ses derniers comptes publiés.
La privatisation du secteur de l'eau au Royaume-Uni il y a 34 ans, sous le gouvernement conservateur de Margaret Thatcher visait à obtenir des investissements privés pour améliorer la qualité de l'eau conformément aux normes européennes. Cependant, cette décision a été critiquée pour favoriser les intérêts financiers des investisseurs au détriment des consommateurs.
La question de nationalisation
Le 2 juillet dans une interview accordé à GBNews, divers élus et experts ont débattus sur la question de la nationalisation.
Selon William Clouston, leader du Social Democratic Party, l'expérience a montré que les entreprises de l'eau sont lourdement endettées avec une rémunération excessives des dirigeants et l'envoi de dividendes à l’étranger. Selon lui, les entreprises sont mal préparées pour faire face à de telles situations. Stefen Pound, ancien membre du Parlement du Labour Party, est également en faveur de la nationalisation, mais souligne que même en nationalisant, la question de la dette ne disparaîtrait pas, et que la régularisation est plus importante à court terme. Ce système semble ne plus fonctionner, et l'eau reste un besoin fondamental, ce qui amène de nombreux acteurs à affirmer qu'il ne faut en aucun cas risquer des restrictions en termes d'accès à l’eau.
Cependant, Len Shackelton, chercheur à l'Institut des Affaires économiques, soulève d'autres problèmes. Il souligne que les prix de l'eau sont restés bas, ce qui a entraîné une augmentation des emprunts. La nationalisation prendrait du temps et serait coûteuse, sans apporter que des aspects positifs : "Si vous regardez l'Écosse et l'Irlande du Nord, qui sont gérées par l'État, nous constatons qu'elles obtiennent de moins bons résultats en ce qui concerne les fuites et les déversements en série."
Est-ce que les consommateurs serrait à risque en cas de transfert ?
Sur le site de Thames water on retrouve une déclaration de l'entreprise sur les événements récents. Cette déclaration veut rassurer ses clients en affirmant que l'entreprise continue de fonctionner normalement. Thames Wter compte mettre en place un plan de redressement et énonce avoir assez de liquidités (4,4 milliards de livres sterling de liquidités et de fonds engagés, au 31 mars 2023) ainsi qu'avoir reçu 500 millions de livres de leurs actionnaires en mars 2023.
De plus, selon Thames Water, Ofwat est tenu au courant des divers progrès de la société et "Thames Water reste concentré sur la prestation de services à ses clients, à l’environnement et aux parties prenantes".
Selon la loi de 1991 sur l'industrie de l'eau, un régime d'administration spécial (en nationalisants temporairement) permettrait de maintenir la fourniture de services aux clients plutôt que de maintenir l'entreprise en activité. Cela signifie que en cas de mise en place d'un régime d'administration spécial, pour une entreprise d'eau, les ménages ne perdraient pas leur approvisionnement en eau et les investisseurs assumeraient un niveau de risque par rapport à leurs décisions. Les réglementations gouvernementales protègent les intérêts des clients et garantissent la continuité du service d'eau, même pendant une période de transition.
Cependant, même si les foyers ne risquent pas de coupures, les factures d'eau au Royaume-Uni pourraient augmenter de 5% chaque année jusqu'en 2025 due aux investissements nécessaires pour moderniser les infrastructures du secteur de l’eau (réparation des fuites, la modernisation des usines de traitement des eaux usées, ainsi que la mise en place de nouvelles infrastructures)
Le gouvernement britannique envisage de mettre en place des changements majeurs dans la réglementation du secteur de l’eau. Aujourd’hui, des discussions sont en cours pour évaluer les options et déterminer les prochaines étapes.