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L'art pour changer de regard sur les sans-abris
Home 2013 de David Tovey Copyrights : A-S Segondat

L'art pour changer de regard sur les sans-abris

Avec l'exposition Homeless: reframed la Saatchi Gallery utilise le pouvoir empathique de l'art pour changer notre perception des sans-abris.

Anne-Sophie Segondat
Membres Public

Sensibiliser sans culpabiliser et donner des raisons d’espérer : c’est tout l’art de l’art. C’est aussi le pari risqué mais gagné de l’exposition Homelessness : Reframed présentée à la Saatchi Gallery jusqu'au 20 septembre et qui vise à transformer notre perception des personnes sans-abris grâce au prisme de l’art. Fruit d'une collaboration entre le programme caritatif Homewards du Prince de Galles William, la Fondation Eleven Eleven et la Saatchi Gallery, l’exposition donne carte blanche à des artistes qui ont eux-mêmes vécus dans la rue pour partager leur histoire.

Un "exercice d'empathie" artistique

L’exposition réunit treize artistes aux trajectoires de vie et de carrière très différentes : les artistes visuels déjà très établis Marc Quinn, Rankin, Philip Colbert et Simone Brewster, côtoient des talents émergents comme le graffeur Opake, le poète Surfing Sofas ou encore l'artiste multimédia Robi Walters. Plusieurs d’entre eux ont été directement touchés par le sans-abrisme et leurs œuvres racontent leurs histoires. La diversité de leurs parcours permet de prendre la mesure de l'étendue et de la complexité des situations des personnes sans-abris à travers le pays. Au Royaume-Unis en effet, plus de 300 000 personnes, dont près de la moitié sont des enfants, se trouvent aujourd'hui sans domicile fixe. Cette réalité englobe de situations extrêmement diverses et très mal connue du grand public allant du "surf de canapé" à la vie dans la rue, en passant par l'hébergement temporaire dans des voitures ou des auberges. L'exposition structurée en trois parties apporte un éclairage nécessaire sur la pluralité des problématiques des personnes sans-abris.

Mots invisibles

La première partie de l’exposition intitulée Mots invisibles présente un mur impressionnant rempli de pancartes en cartons de différentes tailles posées dans des cadres. Ces pancartes écrites par des personnes sans domicile dans le monde entier ont été rassemblées par Wendy Abrams, cofondatrice et directrice générale d'Eleven Eleven - une fondation privée qui œuvre pour le développement durable, la recherche médicale et la justice sociale. Souvent ignorés dans l'espace public, les messages inscrits sur ces pancartes prennent dans l’enceinte d’une galerie d’art une toute autre dimension : ils invitent à la lecture. Ces pancartes expriment toute la complexité et l'ambivalence des émotions vécues par les personnes en situation de précarité allant de la honte au désespoir, en passant par l'humour et la résilience.

Reframed

Cette seconde section regroupe des œuvres créées spécifiquement pour l'exposition. À travers divers médiums les artistes racontent leur expérience personnelle. Parmi les œuvres les plus remarquables, on peut citer Labyrinth Painting du plasticien britannique Marc Quinn, qui place sur une toile ovale l'empreinte digitale de l'écrivaine et réalisatrice Lorna Tucker qui a très longtemps vécu dans la rue afin de questionner les notions d'identité et de liens sociaux. Dans Community l’artiste écossais Philip Colbert, met en scène son personnage emblématique de homard entouré d'amis et de fleurs pour symboliser l'espoir et la résilience. Dans l’installation Pack Away Desire and Other Precious Things, l’artiste et designer Simone Brewster explore les conséquences psychologiques de l'hébergement temporaire en exposant des boîtes de rangement en bois stylisées qui représentent le bagage émotionnel et matériel des personnes en situation de logement précaire. Le collage multimédia d'Alexandria Julouis capture quant à lui l'instabilité du surf sur canapé dans All I Got, soulignant la nature transitoire de ces conditions de vie. Mais l’œuvre la plus poignante de cette section est très certainement l’imposante sculpture rouge Home 2013 de David Tovey. Pour symboliser la période « la plus difficile de sa vie » durant laquelle il a vécu dans sa voiture, l’artiste londonien à transformé une Peugeot 206 en une sculpture de maison méticuleusement soudée à la main. Cette œuvre, profondément personnelle, intègre des éléments de son passé comme des vêtements pliés et de la literie. La voiture symbolise représente tout à la fois les difficultés rencontrées par l'artiste mais aussi la sécurité d'un toit même s'il est fait de taule.

Portes ouvertes

La dernière partie de l'exposition, intitulée Portes ouvertes, présente des créations de jeunes réalisés lors d'ateliers dans les sites pilotes du programme caritatif du prince de Galles Homewards à Aberdeen, Bournemouth, Christchurch, Poole, Lambeth, Newport et à Sheffield. Réalisées en collaboration avec des artistes locaux ayant été sans abris eux-mêmes, ces œuvres sont chargées d'espoir. Ces portes en bois symbolisent en effet les différents voies menant à la sortie de la précarité.
Ces portes racontent des histoires d'espoir et de résilience, tout en soulignant l'importance du soutien communautaire. Ces portes sont une invitation à ouvrir les yeux, pour voir au-delà des stéréotypes et reconnaître en chacun l'humanité.

L'exposition est ouverte jusqu'au 20 septembre à la Saatchi Gallery.

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