Lush: la cosmétique "verte" oui, les affaires d'abord
C'est le nouveau "green hub" ou centre "vert" de la marque de cosmétiques Lush dans son siège situé à Poole, au sud-ouest de l'Angleterre, qu'elle fait visiter à quelques journalistes.
La marque co-fondée en 1995 et dirigée par Mark Constantine se revendique écologiste de la première heure. Mais l'entreprise se refuse toutefois aux labels bio ou autres certifications de son plan de transition climatique. L'entreprise vend deux tiers de produits secs pour limiter les contenants en plastique, dont des boules de bain, le savon et du henné en barre. Mais Mark Constantine n'a pas d'états d'âme à dire que Lush commercialise aussi des bouteilles plastique de gel douche - recyclées - et autres produits emballés. "L'environnement est très important pour nous, mais nous ne sommes pas idiots. Je ne pense pas que les gens qui achètent chez nous le font avant tout pour l'environnement. Ils veulent d'abord un produit qui marche", résume-t-il. Le groupe n'a pas de projet de vendre en vrac gels douches ou shampoings mais les clients sont incités par un petit rabais à rapporter leurs pots usagés pour qu'ils soient recyclés.
Lignes rouges
Mark Constantine se fixe quelques lignes rouges, comme mettre des pompes dans ses flacons de gel douche: les ressorts en métal les rendent impossibles à recycler, explique-t-il, en arpentant une boutique témoin de son centre d'innovation décorée d'un mur de boules de bains colorées, de barres de savon à la coupe imitant des fruits, et d'étals façon épicerie.
La marque, qui n'est pas sur le radar des ONG écologistes, est saluée par les sites Ethical Consumer et Bettergoods.org pour son engagement de la première heure contre les tests sur les animaux.
Mais elle est critiquée pour le recours à des ingrédients chimiques qualifiés de "toxiques", des dérivés d'huile de palme et son manque de bilan carbone crédible.
Le groupe dit ne plus utiliser d'huile de palme brute et chercher activement des alternatives pour éliminer ses dérivés. Ruth Andrade, cheffe des efforts du groupe en faveur de l'environnement, met en avant une "liste de tâches climatiques" à réaliser avant 2030, comme utiliser la chaîne d'approvisionnement "pour s'assurer qu'il n'y a pas de déforestation", "remplacer les énergies fossiles par de l'électricité et s'orienter vers les renouvelables" ou "rendre tous nos matériels régénératifs
et circulaires".
Mme Andrade affirme qu'une très grande majorité du plastique et carton utilisé chez Lush est déjà recyclé, recyclable ou peut être retourné en magasin. Le groupe veut aussi diminuer son empreinte carbone en favorisant des modes de transport les moins polluants. Lush, qui compte 14.500 employés, défend férocement son indépendance. La société, fondée par six amis, reste détenue par seulement neuf actionnaires, dont un trust d'employés qui possède 10%.
Mark Constantine dit toujours vivre à Poole, où le groupe est un employeur local important dans une région qui a voté à son grand dam le Brexit. Lorsqu'il évoque ses ventes en baisse en Europe, notamment en France et en Allemagne, il l'attribue en partie à la sortie de l'UE, plus qu'à l'inflation, même si Lush a augmenté ses prix en ligne avec la flambée des prix, qui atteint 10% au Royaume-Uni. Selon lui, même si vous réduisez vos dépenses, "vous pouvez quand même prendre un bain".
Le groupe avait vu son chiffre d'affaires baisser légèrement, à 408 millions de livres, en 2020/2021, derniers résultats publiés, les comptes de l'exercice suivant étant retardés par l'intégration du rachat d'une entreprise nord-américaine affiliée.
Dans le reste de l'industrie, le géant L'Oréal affiche une croissance insolente, mais Estée Lauder a tranché dans ses prévisions et a pâti du marasme en Chine. Le dirigeant de 70 ans est confiant dans le fait que l'envolée des prix va se tarir rapidement, juste à temps pour Noël et le déploiement de nouveaux magasins étendards de plusieurs étages.