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"Le Mariage de Figaro" : quand l’opéra se réinvente à Londres
London Coliseum - photo F. Joyce

"Le Mariage de Figaro" : quand l’opéra se réinvente à Londres

Le London Coliseum présente jusqu'au 22 février 2025, une version innovante et puissante du plus célèbre opéra de Mozart

Francine Joyce
Membres Public

Les Noces de Figaro de Joe Hill-Gibbins pour l'English National Opera (ENO) a été présenté pour la première fois en mars 2020 … pour une seule représentation avant de fermer son rideau immédiatement, comme tout le reste de la Grande-Bretagne, en raison de la pandémie Covid.

Cinq ans plus tard, le spectacle connaît une seconde vie au London Coliseum avec une distribution presque entièrement différente mais une production moderne, dynamique et innovante.

credit Zoe Martin

La mise en scène fougueuse rappelle le fabuleux scénario du film “Cuisine et Dépendances “ de Philippe Muyl . L’histoire d’une soirée catastrophe où tous les invités se disputent, se jaugent, se trahissent  dans la cuisine qui devient le lieu de passage de leurs doutes et de leurs rancœurs.

Dans la version 2025 de l’opéra de Mozart, le décor signé Johannes Schütz, est lui aussi minimaliste : un cube géant qui s’élève pour les scènes dans la chambre de la Comtesse à l’étage et qui recule pour les péripéties dans le jardin en contrebas.

photo Zoe Martin

Pas d’accessoires, juste un grand mur blanc éclatant et 4 portes blanches pour mettre l’accent sur la musique plus que sur l’intrigue. Les interprètes glissent le long des murs dans des contorsions anatomiques qui semblent refléter les tourments de leurs personnages. En perpétuel mouvement, le plateau dévoile avec fraicheur les subterfuges et manigances des nobles et des domestiques, les entrelacs de leurs alliances capricieuses, volages et inconstantes. Les portes s’ouvrent et se ferment (peut-être un peu trop souvent mais ingénieusement) pour laisser entrer et sortir des personnages infatigables.

Mais cette simplicité  à la de Funès dans un couloir d’hôtel, est ici bien trompeuse ! L’approche de Joe Hill-Gibbins est particulièrement intelligente et appropriée au comique des comédies qui repose fréquemment sur “qui sait quoi à quel moment”. Trois heures et vingt minutes de tumultes donc, où on ne sait jamais qui attend derrière une porte fermée ou qui se cache derrière une porte grande ouverte !

Le chef d’orchestre Ainārs Rubiķis qui fait ses débuts dans cette Grande Maison, dirige avec chaleur, enthousiasme et vivacité l’orchestre du English National Opera. On se laisse emporter par le tempo joyeux et ensorcelant.

Seuls les costumes sont discutables ( la Comtesse en pantalon à franges, style western sous un imperméable rose fuschia et lunettes solaires à la Jackie Kennedy, Cherubino en chemise hawaïenne, Figaro en costume turquoise, Barbarina alias Ava Dodd, en mini-jupe et postures dignes des pires influenceuses d’Instagram, le Comte en hipster rasta , les domestiques en brigades de restauration aux collants rouge vif et ballerines blanches…Aucun costume ne reflète un quelconque statut social ce qui occulte complètement et tristement la satire sociale de départ de Beaumarchais.

La traduction anglaise de Jeremy Sams du livret de Da Ponte est astucieuse est pleine d'esprit. Elle est interprétée avec brio par l'ensemble de la distribution.

David Ireland dans le rôle de Figaro exaspéré et Mary Bevan dans le rôle attachant de Susanna chantent apparemment sans efforts toute la gamme de leurs émotions.

David Ireland dans le rôle de Figaro et Mary Bevan dans le rôle de Susanna - photo Zoe Martin

La mezzo-soprano polonaise Hannah Hipp est pétillante dans la reprise de son rôle de 2020 en Cherubino version boy scout qui n’hésite pas à se jeter par la fenêtre pour atterrir sur un matelas de réception.

Le baryton américain Cody Quattlebaum capture avec puissance toute l’arrogance du Comte, prédateur lubrique mais sa voix se perd — voire disparait parfois -dans les graves.

En revanche, la voix somptueuse de la comtesse est bouleversante d’intensité et de voluptueuse légèreté. Elle chante avec souplesse, exaltation et sensualité entrainant tout le public avec elle. À ses côtés, Neal Davies et Rebecca Evans forment eux un duo harmonieux en Bartolo et Marcellina.

Un spectacle d’une originalité et d’une puissance à ne pas râter !

photo F. Joyce

"The Marriage of Figaro"

au London coliseum

jusqu'au 22 février 2025

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